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Le programme de la langue française en fête

Direction de la Langue Française

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Pourquoi une politique de la langue?

Monsieur Albert n’a pas bien compris les clauses en petits caractères qui figuraient sur un contrat de vente à tempérament. Le voilà gravement endetté...

Gilberte Martinez a acheté un appareil électrique dont le mode d’emploi est rédigé dans plusieurs langues qu’elle ne comprend pas. Elle a commis une erreur de manipulation, et le voilà abimé. Mais le fabricant n’interviendra pas…

Sémir Marzouki est un ingénieur très qualifié. Mais il n’aura pas d’augmentation dans sa boite, car il n’est pas trilingue, ce qui est un strict minimum aux yeux du DRH.

Leila est une vieille dame qui a toujours besoin de sa petite-fille pour toutes ses démarches. Elle a beaucoup de relations dans son quartier, mais ne comprend rien à la vie politique et administrative du pays où elle vit, parce qu’elle n’en parle pas la langue.

Gabriel est passé en justice. Mais il n’a strictement rien compris lorsque le juge a lu la sentence. Son avocat a dû prendre beaucoup de temps pour lui expliquer les raisons qui lui valaient son  acquittement.

Ces situations sont évidemment très dommageables pour ceux qui les vivent : perte d’argent, de temps, de confiance en soi, risques physiques même. Elles sont aussi dommageables pour la société. Or elles sont très fréquentes.

Est-ce une fatalité ? Ne peut-on pas faire quelque chose ? Par exemple former ceux qui rédigent des textes pour qu’ils soient compréhensibles pour le public ? obliger les fabricants à étiqueter leurs produits dans la langue du client ? promouvoir des méthodes rapides d’acquisition des langues ? imaginer de meilleures façons d’intégrer nos hôtes, en restant respectueux de leurs différences…. ?

C’est évidemment à la collectivité de prendre toutes ces mesures en charge. Exactement de la même manière qu’elle s’occupe de l’hygiène sur les lieux de travail ou de la sécurisation des passages à niveau…

Il y a donc place pour une politique de la langue, à côté d’une politique de la santé, ou d’une politique culturelle.

Cette politique de la langue a des objectifs très nombreux : insérer harmonieusement le citoyen dans la société, lutter contre les exclusions, développer la créativité, éduquer à la tolérance, stimuler la participation de notre économie aux innovations technologiques actuellement les plus porteuses, qui ont toutes à voir avec le langage…

Malheureusement, les aspects langagiers des grands problèmes sociaux ou économiques sont souvent purement et simplement ignorés. On les trouve pourtant partout : ils relèvent, par exemple, de la politique scientifique (pratiques de diffusion des résultats, de vulgarisation), de la politique de protection du consommateur (modes d'emploi, sécurité), de la politique de la formation et de l'emploi, de la politique de contacts entre le citoyen et les pouvoirs publics (simplification du langage administratif, juridique, etc.), de la politique du développement informatique, de la politique d'intégration, notamment quand l'intégration visée est celle de personnes exclues par leurs origines culturelles ou sociales… Une politique de la langue doit donc aussi avoir pour but de rendre les intéressés — et les décideurs ! — sensibles à toutes ces questions.

Comme presque tous les États démocratiques modernes, la Fédération Wallonie-Bruxelles s’est dotée d’instruments pour tenter d’atteindre ces objectifs de politique linguistique : une administration et un laboratoire d’idées.

La première est la Direction de la Langue française, qui est chargé de mettre en œuvre la politique linguistique du Gouvernement. Le laboratoire est le Conseil de la langue française et de la politique linguistique, un groupe de citoyens et d’experts dont la mission est de donner des avis au Gouvernement sur les axes de sa politique linguistique.

La mission de l’un et de l’autre est délicate. Outre que les moyens de la Fédération Wallonie-Bruxelles ne sont pas démesurés, la sensibilité aux enjeux sociaux impliqués par la langue n’est pas toujours évidente, comme on l’a dit. En outre, la politique linguistique doit prendre en considération non seulement la langue française, soubassement de notre Communauté, mais aussi les autres langues qui y sont mobilisées  — langues régionales, langue dite « des signes », langues utilisées en milieu de travail, langues de l'immigration — de façon à ne pas laisser inexploité ce riche gisement culturel. Enfin, les problèmes que l’on a relevés sont partout, et leurs solutions doivent parfois être trouvées en dehors de la Fédération Wallonie-Bruxelles : Régions wallonne et bruxelloise, État fédéral, communes…